Valentins,
À l’heure de vous déclarer à votre bienaimée, souvenez-vous de Pétrarque et prenez exemple : Le plus grand poète amoureux a écrit avant vous la délicieuse douleur d’aimer. Écoutez-le chanter sa rencontre avec Laure, la dame aux cheveux d’or. Le dédain de la belle, d’ailleurs mariée, fit saigner le cœur de Pétrarque… et offrit à la littérature les plus beaux vers d’amour.
Abondamment racontée dans le Canzionere, son recueil le plus fameux, la rencontre de Pétrarque et Laure a lieu le 6 avril 1327 (il y a 691 ans !). Elle est aussi au cœur d’un texte plus rare de nos jours mais tout aussi beau, Les Triomphes, dont nous vous offrons un extrait dans la magnifique traduction encore inédite de Jean-Yves Masson.
Dans le Triomphe de l’Amour, voici Pétrarque saisi, pétrifié par elle :
«
A l’écouter, craignant un mal futur,
Comme un qui tremble avant même l’assaut
Et qui se sent blessé encore indemne,
J’avais le teint de qui sort du tombeau ;
Quand près de moi vient une jeune fille
Pure bien plus qu’une blanche colombe.
Et je fus pris ; moi qui aurais juré
Qu’un homme armé ne saurait point me vaincre
Je fus lié par ses mots et ses gestes
. »
«
Aveugle et sourd à tout autre plaisir,
Je la suivais par de si grands périls
Que j’en frémis encor quand j’y repense.
Et j’eus dès lors les yeux baissés, humides,
Le cœur pensif, et cherchai pour refuge
Bois et rochers, sources, fleuves, montagnes ;
Depuis ce jour je couvre de pensées,
D’encre et de larmes des pages sans nombre,
Et j’en noircis autant que j’en déchire ;
Depuis ce jour je sais ce qu’on ressent,
Espère et craint dans le cloître d’Amour,
Quels mots pourraient égaler la noblesse
De ses façons, sa douceur, sa vertu ?
Pour cette mer, mon style est un ruisseau.
»
Pétrarque a fait de l’Europe renaissante un continent de poètes amoureux dont vous êtes, Valentins, les héritiers.
A paraître aux éditions Diane de Selliers en octobre 2018: Les Triomphes de Pétrarque illustrés par le vitrail du XVIe siècle. Traduction française de Jean-Yves Masson.